Une faible couche de sable ou même pas de sable du tout au fond de l'aquarium est une tendance (*) qui a gagné les amateurs de récifs miniatures. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas utiliser de sable mais seulement que si l'on n'en utilise pas son entretien en est facilité !
Une épaisseur de sable non entretenue a tendance à accumuler rapidement les sédiments (détritus) et si l'on ne s'en débarrasse pas, des zones anaérobies (pauvres en oxygène) peuvent se développer alors que les bactéries consomment de l'oxygène pour pousser plus loin la décomposition de ces sédiments. Les sédiments agissent souvent comme une source de phosphates : quand les bactéries les décomposent, ils relarguent les phosphates emmagasinés. Ces phosphates deviennent alors des nutriments pour les algues indésirables comme les algues filamenteuses (Derbesia) et les cyanobactéries. Parce qu'il y a encore aquariophiles qui utilisent des filtres sous gravier (**) avec des couches de sable relativement épaisses et d'autres qui aimeraient utiliser un fond sablonneux pour des raisons esthétiques, il est primordial de trouver un moyen de régler le problème des sédiments.
Nous avons plusieurs techniques pour réduire l'accumulation des détritus dans les substrats de sable grossier utilisés avec un filtre sous sable. Vous pouvez remuer périodiquement le substrat et siphonner ces détritus en même temps que vous effectuez les changements d'eau. C'est souvent fastidieux et cela prend du temps dans les grands aquariums au décor chargé. Un courant puissant, dirigé le long de la surface du sol, peut également aider à empêcher ces sédiments de s'installer dans le sol. De cette manière les sédiments sont maintenus en suspension dans l'eau où ils peuvent être retirés par des filtres externes et une colonne de débordement. Mais, tous les aquariums ont des zones mortes et les particules ne peuvent pas être éliminées facilement par les courants. Aucune de ces méthodes ne convient parfaitement pour lutter contre l'accumulation des sédiments sous le décor ou sous les pierres vivantes. Si vous voulez utiliser un sol dans un aquarium récifal sans filtre de fond, les grains ne doivent pas être trop gros afin de ne pas laisser les sédiments et le mulm s'accumuler dans et sous le sable. Le sable classique à grosse granulométrie ne convient pas. Un sable de corail fin (2 à 4 mm de diamètre) conviendra bien mieux pour une épaisseur comprise indifféremment entre 1 et 10 cm. Un tel sol dans un aquarium avec des pierres vivantes et des coraux peut avoir un rôle bénéfique en offrant un refuge aux petits crustacés, vers et autres organismes aidant à la décomposition des déchets et il peut devenir également une source de nourriture pour les poissons. Les larves de ces organismes contribueront aussi à la population planctonique de l'aquarium en procurant une source de nourriture aux autres invertébrés. Des zones anaérobies peuvent se développer dans le substrat et participer à la dénitrification. Si la charge organique est trop grande, une production de sulfure d'hydrogène aura lieu.
Les options citées pour maintenir le sable grossier propre peuvent également s'employer dans les aquariums récifaux avec des substrats plus fins. Cependant, en utilisant des sables fins, d'autres options biologiques s'offrent aux aquariophiles. Vous pourriez peut-être utiliser l'aide des "équipes de nettoyage" naturelles, qui vous faciliteront la tâche en maintenant un environnement optimal pour vos invertébrés ?
Les récifs coralliens sont des environnements d'une telle diversité que peu de niches écologiques (rôle dans l'environnement) sont inutilisées. Par exemple, beaucoup d'organismes se servent des zones sableuses entourant les récifs comme source de nourriture et de protection. Ce qui inclut de nombreuses variétés de crevettes, étoiles de mer, holothuries (concombres), ophiures, oursins et poissons. En Europe (***), la majorité des aquariums récifaux emploient de tels organismes pour aider à maintenir en bonne santé des sols coralliens.
Photo, Bertrand LESAEC
Ces poissons se nourrissent généralement en tamisant à pleines bouchées le sable à travers leurs ouïes, entraînant ainsi une infauna comestible telle que des vers et des petits crustacés.
En agissant ainsi, ils aident à empêcher que le substrat se colmate avec les sédiments et se recouvre d'algues. Avantage supplémentaire, quand le sable passe à travers les fentes branchiales, ces sédiments sont remis en suspension et emportés par les courants dans le filtre et la colonne de débordement.
Par contre, un inconvénient avec ces poissons est qu'ils peuvent faire retomber du sable sur des animaux inféodés au substrat comme certains coraux et anémones. Ainsi donc, il est préférable de ne pas maintenir certains organismes sessiles sur le sol de l'aquarium. Mais d'autres coraux durs, habitants inféodés normalement au sol, comme les Fungia sp., Heliofungia sp., et Herpolitha sp., peuvent se débarrasser facilement de tout substrat pouvant retomber sur eux. Comme exemple de cette "philosophie", Seaworld dans l'Ohio utilise une paire de Valenciennea strigata dans leur aquarium récifal. Ces poissons maintiennent au sable de corail du sol une apparence de blancheur immaculée en le débarrassant des microalgues (P. Mohan, notes personnelles ; C. Delbeek and S. Michael, observations personnelles).
La majorité de ces " aspirateurs " vivants, appartiennent à la famille des Gobidés. C'est la plus grande famille de poissons marins du monde, comportant plus de 2000 espèces. Il existe environ 200 genres et 550 espèces (Myers 1989) uniquement dans la région Indo Pacifique. Dans cet article nous parlerons de trois genres, communément trouvés dans les magasins aquariophiles, que l'on pourra utiliser de différentes manières pour aider à maintenir le substrat des aquariums. Il s'agit des Amblygobius sp., Signigobius biocellatus, et Valenciennea sp.
Les membres de ces genres sont dits "cryptiques" ce qui veut dire qu'ils utilisent comme abri les terriers qu'ils creusent ou appartenant à d'autres organismes. Dans les aquariums, le manque le substrat de fond et de gravier (important pour l'infrastructure du terrier) peut rendre la tache difficile à ces poissons pour qu'ils construisent leur "maison". L'aquariophile peut les aider en créant des terriers artificiels avec des tubes en PVC. Il suffit de tailler une extrémité du tube afin que l'orifice soit dirigé vers la surface quand celui-ci est posé à plat sur le fond de l'aquarium. Fermez l'autre extrémité par un bouchon, et enterrez le tube sous le sable, roches ou débris. Pour donner au "terrier" un aspect plus naturel, du sable et du gravier peut être collé à la silicone sur le tube autour de l'entrée. Assurez-vous que le diamètre du tube soit au moins le double de la circonférence de l'occupant potentiel.
(*) Ce texte à été écrit probablement fin 92, début 93 et il ne faut pas oublier que les techniques Berlinoises étaient en plein essor à cette époque là. Les sédiments étaient déjà un réel problème et les aquariums "bare bottom" (à fonds nus) faisaient leur apparition. C'était un bon moyen de faciliter la chasse aux détritus générateurs de phosphates et l'idée se répandait de plus en plus à travers le monde car elle paraissait être une excellente solution. Le problème des sédiments est toujours d'actualité et les bacs à fonds nus sont toujours une alternative à ne pas rejeter, quelles que soient les modes. (N.D.T.)
(**) L'emploi de filtre sous sable peut provoquer un certain étonnement chez les lecteurs car il est tombé en désuétude depuis longtemps chez nous mais il faut savoir que cette technique est encore très prisée et toujours recommandée de nos jours dans la littérature anglo saxonne. (N.D.T.)
(***) l'Europe en général et l'Allemagne et les Berlinois en particuliers ont toujours une image très forte de "maîtres à penser" aux Etats-Unis en ce qui concerne l'aquariophilie récifale. Si c'est flatteur pour nous Européens, c'est assez justifié car c'est bien d'Allemagne que sont venus tous les grands développements de ce hobby même si nous avons tendance de nos jours à regarder tout ce qui vient des Etats-Unis avec une admiration, souvent justifiée également, mais parfois surestimée. (N.D.T.)
D'autre part j'ai volontairement supprimé de ce texte les noms anglais de ces poissons pour les regrouper dans le tableau II en bas du texte. Nous ne les employons pas en français mais comme les anglo-saxons eux les utilisent tout le temps, ce tableau sera pratique pour savoir de quels poissons il s'agit au cas où vous les rencontreriez dans de futures lectures en V.O. (N.D.T.)
Genre Amblygobius (Hover Gobies)
Photo, Christian SEITZ
Ces petits poissons (4.5 à 12 cm en longueur) se rencontrent en général au-dessus des zones sableuses mais certaines de ces espèces se trouvent également sur des surfaces rocheuses. Il existe au moins neuf espèces dans ce genre mais celles que l'on trouve le plus souvent dans les commerces aquariophiles sont Amblygobius hectori (Smith, 1956), A. phalaena (Valenciennes, 1837) et A. rainfordi (Whitley, 1940).
Ces trois espèces passent la plus grande partie de leur temps en nage stationnaire à proximité du sol, piochant constamment le substrat et recrachant des quantités de sable et de détritus. Amblygobius phalaena et A. hectori utilisent le terrier d'une crevette ou d'autres poissons dans le sol ou sous les pierres alors que A. rainfordi, qui n'utilise pas de terrier, est souvent observé nageant au-dessus de colonies coralliennes. En milieu naturel A. phalaena est solitaire ou en couple et partage souvent un terrier avec des Valeciennae ou des poissons-chirurgiens juvéniles (Paulson 1978; S. Michael, observations personnelles).
Comportement en aquarium
En aquarium, ces poissons préfèrent un environnement tranquille avec de nombreuses cachettes. Quand on les maintient dans un bac avec de grand poissons très vifs, ils restent cachés la plupart du temps et peuvent ne pas se nourrir suffisamment. Photos, Christian SEITZ
De ces trois espèces, A. phalaena est le plus facile à maintenir et c'est également le meilleur tamiseur de substrat. Il est en général facile à nourrir, acceptant pratiquement toutes sortes d'aliments et Myers (1989) rapporte qu'il consomme de grandes quantités d'algues. A. rainfordi est aussi un grand mangeur d'algues broutant les algues filamenteuses rouges et vertes. A. rainfordi et A. hectori seront mal à l'aise en compagnie de poissons agressifs et bénéficieront d'un bon apport d'algues filamenteuses. Ces deux espèces accepteront volontiers des larves de moustiques et des artémias vivantes et, avec de la persévérance, ils pourront être habitués à des nourritures congelées.
Les membres de ce genre ne sont pas agressifs envers les autres espèces et n'embêtent pas les invertébrés, ce qui en fait d'excellents candidats pour un aquarium récifal.
Le seul problème qu'ils peuvent avoir, c'est de trouver suffisamment à manger dans de grands aquariums sans algues filamenteuses.
A. phalaena peut être facilement maintenu solitaire ou en couple mais plus de deux individus de la même espèce ou genre se battront constamment ce qui aura pour résultat la mort du plus faible (Achterkamp 1991; S. Michael, observations personnelles). Cela semble également vrai pour les autres poissons du genre Amblygobius. Le peu d'expérience qu'ont eu les auteurs avec A. hectori laisse penser qu'il est timide et difficile à nourrir.
Reproduction
Achterkamp (1991) nous a fournit des détails sur la reproduction de A. Phalaena et il est probable que le processus soit similaire chez les autres espèces. Le mâle adulte chez A.phalaena (approximativement 12 cm) se distingue des femelles par plusieurs points sur la nageoire caudale. Quand le moment de la ponte approche, le couple parcourt l'aquarium à la recherche d'un trou convenant à l'établissement du nid en perturbant énormément le substrat pendant cette action. Une fois le nid construit, la ponte commence habituellement le soir. Plusieurs gros paquets de centaines d'œufs d'une couleur crème grisâtre sont déposés. Après la ponte, le mâle défend vigoureusement le territoire et peut même écarter la femelle. Environ 6 jours plus tard les œufs éclosent et le couple ignore le frai qui s'élève vers la surface. Un couple peut pondre plusieurs fois par mois ou seulement une ou deux fois par an.
Photo, Christian SEITZ
Si quelqu'un détient des informations sur le comportement et la reproduction des autres espèces, nous aimerions en être avertis !
Genre Signigobius
Signigobius biocellatus (Hoese and Allen 1977), est l'unique espèce du genre, facilement reconnaissable par ses grands ocelles sur les nageoires dorsales antérieures et postérieures. On le rencontre dans les lagunes abritées, sur les fonds de sable et de gravier corallien. Il occupe des terriers qu'il creuse lui-même, rentrant la tête la première dans l'excavation en remuant énergiquement sa queue et s'aidant de sa bouche pour transporter du sable et des fragments de coquillages (Hudson 1977). Le terrier sert d'abri et à la reproduction. Les juvéniles sont solitaires et les adultes (7.5 cm) sont toujours en couple (Debelius 1986). Il se nourrit de la même manière que les Amblygobius, en prenant du sable à pleine gueule qu'il tamise à travers ses fentes branchiales.
Ce poisson se déplace en sautillant sur le sol. Fréquemment, il déploie soudainement ses deux nageoires dorsales vers l'avant, exhibant ainsi ses deux grands ocelles. Si un prédateur ou un rival approche, il dressera ses nageoires en arquant la partie postérieure de son corps et en se mettant en travers. Vu de côté, ce gobie ressemble à la tête d'un poisson piscivore et il peut ainsi décourager l'attaque d'un prédateur. Il a été aussi suggéré que vu latéralement, avec son comportement sautillant et son déploiement de nageoires dont les ocelles seraient des yeux, il imitait un crabe se déplaçant sur le sol (Hudson 1977).
Comportement en aquarium
Des observations personnelles, des discussions avec d'autres aquariophiles et des lectures approfondies mènent toutes à la conclusion que ce n'est pas une espèce facile à maintenir. Vous les trouverez généralement vendus par paires et nous vous recommandons de les acheter ainsi. S'ils sont séparés, ils ne vivent habituellement pas longtemps. Il faut les maintenir dans un aquarium ayant un fond de sable fin avec un peu de gravier corallien, ce qui favorisera leur comportement de terrassier. Il faut leur fournir également de nombreuses cachettes. Artémias et larves de moustiques vivantes peuvent être utilisées pour acclimater les sujets les plus difficiles mais une fois qu'ils acceptent de s'alimenter, leur menu devra être aussi varié que possible. Il faut les nourrir AU MOINS deux fois par jour afin qu'ils maintiennent leur masse corporelle. S. biocellatus ne doit pas être associé avec des colocataires agressifs comme des Pseudochromis et des grands labres, particulièrement dans les bacs de petite taille ; ils vivent beaucoup mieux en bacs spécifiques (G. Schiller, communication personnelle).
Reproduction
Le comportement de Signigobius biocellatus pendant la reproduction est très particulier ; il a été décrit en milieu naturel par Hudson (1977). Comme nous l'avons déjà mentionné plus haut, ils forment des couples monogames et partagent un terrier. La femelle gravide mordille le corps du mâle avant la ponte, puis entre dans le terrier et dépose ses œufs. Après la ponte, le mâle est emmuré dans le terrier où il fertilise les œufs, il veille sur eux et il est probable qu'il les ventile. Le mâle reste dans le terrier pendant deux ou trois jours. Pendant cette période, la femelle ouvrira la "chambre" de temps en temps pour libérer le mâle et le couple accomplira quelques travaux de nettoyage. A la suite de quoi le mâle réintégrera le terrier où il sera de nouveau emmuré.
Finalement, le mâle sortira une dernière fois du terrier et les deux parents fermeront l'entrée et déménageront vers un nouveau terrier, ou rouvriront un ancien à proximité. De temps en temps, les parents rendent visite à la chambre "nurserie", l'ouvrent, débarrassent les débris et l'irriguent en eau fraîche en entrant à reculons et en remuant doucement leur éventail caudal. Finalement le terrier est ouvert une dernière fois et un seul juvénile en sort. On ne sait pas encore exactement comment le jeune poisson se nourrit pour se développer dans le terrier mais il a été suggéré qu'il utilise ses réserves vitellines, se nourrit de micro plancton ou bien il est possible qu'un embryon se développe plus rapidement que les autres et qu'il mange ses frères (Hudson 1977) !
Genre Valenciennea (Sleeper Gobies)
Photo, Christian SEITZ
Il y a environ une quinzaine d'espèces de ce genre dans les eaux tropicales d'une taille de 5 à 20 cm (Debelius 1986). Quelques-uns arrivent souvent dans les bacs des vendeurs de poissons marins tels que : Valenciennea strigata (Brousonet, 1782), V. puellaris (Tomiyama, 1955), V. wardi (Playfair & Gunther, 1886), V. sexguttata (Valenciennes, 1837), V. helsdingenii (Bleeker, 1858), V. longipinnis (Lay & Bennett, 1839). Vous trouverez en bas de la page un tableau avec des informations sur leurs tailles maximales et leurs caractéristiques distinctives.
Ces gobies se nourrissent principalement de petits crustacés (généralement de moins d'un millimètre en longueur) et parfois de minuscules gatéropodes, coquillages, foraminifères et vers polychètes (Hiatt & Stratsburg 1961, St. John et al 1989). Quelques espèces plus grandes comme V. strigata peuvent, en de rares occasions, manger de petits poissons (Hiatt & Stratsburg 1961). Une étude sur V. longipinnis nous apprend que ce poisson engouffre des bouchées de sol sédimenteux jusqu'à une profondeur de 3 cm et à un rythme d'environ 6 par minute pendant la journée (St. John et al 1989). Pour nettoyer le substrat de l'aquarium les Valenciennea ne sont pas toutes aussi efficaces. Certaines sont plus acharnées que d'autres pour tamiser le sol. Par exemple, les auteurs ont découvert que V. puellaris et V. longipinnis sont plus efficaces pour déplacer les sédiments que V. wardi et V. helsdingenii.
La dimension des terriers varie d'une espèce à l'autre. Dans le cas de V. sexguttata, le terrier fait 10 à 15 cm de long, avec un "plafond" de graviers coralliens et un "plancher" rectangulaire (Paulson 1978). Pour un gobie de plus grande taille comme V. strigata, il a fallu 6 litres de résine pour remplir un terrier (Paulson 1978)! Ceux de certaines Valenciennea offrent un refuge pour d'autres poissons aussi bien que pour le gobie qui y habite. Par exemple, des juvéniles d' Acanthurus triostegus se réfugient dans 2% de tous les terriers de V. sexguttata observés près de l'Atoll de Enewetak. 20% de tous les terriers de V. puellaris examinés, contenaient des juvéniles de Zebrasoma flavescens. Des petits groupes de 2 à 20 individus de Ptereleotris microlepis furent observés au-dessus de l'entrée des terriers de V. sexguttata, V. puellaris et V. longipinnis où ils se réfugient à l'approche d'un prédateur (Paulson 1978; S. Michael, observations personnelles).
Quelques espèces de Valenciennea ont d'intéressants comportements de défenses qui peuvent être observés en aquarium. Par exemple, les juvéniles de V. wardi ont un ocelle sur la nageoire dorsale et un sur la caudale et, comme Signigobius biocellatus, vu latéralement il imite la gueule d'un prédateur. Quand il est menacé V. wardi se présente de côté en dressant sa nageoire dorsale et en relevant sa queue exhibant ses ocelles en formes d'yeux (S. Michael, observations personnelles).
Comportement en aquarium
Photos, Christian SEITZ
Les Valenciennea forment un couple pour la vie lorsqu'ils sont juvéniles (Debelius 1986). Généralement le couple occupe un terrier personnel, mais quelquefois une dizaine d'autres Valenciennea, de différentes catégories de taille, utiliseront le même terrier (Paulson 1978). Les Valenciennea sont parfois vendues en couple et les auteurs recommandent en ce cas de les acheter tous les deux. Si vous avez un unique spécimen, essayez de lui trouver un compagnon car ils vivent mieux en couples ; les comportements affectifs du couple sont fascinants à observer. La plupart sont faciles à repérer dans la mesure où ils nagent très proches l'un de l'autre dans l'aquarium, la mâchoire inférieure de l'un touchant le haut de la tête de l'autre. Ils font penser à un couple de patineurs artistiques "valsant" ensemble dans l'aquarium. Les mâles sont facilement différentiables des femelles par leur deuxième épine dorsale plus développée, à l'instar des poissons-mandarins (Delbeek 1989).
Certaines Valenciennea passent la plupart de leur temps en nage stationnaire au-dessus du substrat (par ex.: V. strigata) alors que d'autres sont plus souvent observées reposant sur le fond (par ex.: V. puellaris, V. wardi). Certaines sont plus discrètes que d'autres. Par exemple, il est possible que l'aquariophile ne voit pas pendant des semaines un V. wardi nouvellement introduit et quand il se montre, ce n'est que pendant un court instant.
Il n'est pas rare que des gobies introduits dans un aquarium pour la première fois, se cachent pendant plusieurs jours, le temps de s'acclimater à leur nouvel habitat. Une fois qu'ils ont surmonté leur timidité naturelle, ils se lanceront dans les travaux de construction de leur "maison". Cela consiste en général à creuser un trou sous une pierre qu'ils partageront à deux. Il est donc important d'arranger votre décor d'une manière stable, autrement vous pourriez retrouver ce décor amoureusement assemblé sous la forme d'un abominable tas de pierres écroulé sur le sol !
Le comportement alimentaire des Valenciennea aide non seulement à remettre les sédiments en suspension mais leurs terrassements sous les pierres se révèle également bénéfique.
Quand le soir arrive, le couple se retire dans leur terrier et le mâle construit un petit empilement de gravier à l'entrée ou en obture le seuil avec une touffe d'algue pour la nuit. S'ils arrivent à survivre quelques mois sans problème, ils devraient vivre de nombreuses années (Achterkamp 1986). Les Valenciennea mangeront la majorité des nourritures proposées mais cela peut prendre plusieurs semaines avant qu'ils acceptent la nourriture conventionnelle. Ils adorent particulièrement les petits crustacés (artémias, mysis) et les larves de moustiques, mais il faut varier leur menu. Il est également possible que certains se nourrissent de larves et de jeunes polychètes bien qu'ils aient été vus ingurgiter des vers adultes puis les recracher. Comme beaucoup de ces poissons sont très actifs et peuvent atteindre 20cm en longueur, il faut bien les nourrir autrement ils dépérissent. Il est donc primordial d'avoir un bon système de filtration, de préférence amélioré par un écumeur pour évacuer la quantité considérable de déchets qu'ils produisent.
Reproduction
Photo, Christian SEITZ
Comme nous l'avons déjà dit, les mâles Valenciennea sont facilement reconnaissables par leur seconde épine dorsale plus allongée. Les femelles pondent en général environ 2000 œufs sur le plafond du terrier. Elle va s'en occuper pendant 3 semaines pendant les quelles elle ne quittera pas la "chambre". Juste avant l'éclosion, le mâle va sceller l'entrée de la chambre emmurant la femelle. Quand les œufs seront éclos, il rouvrira la chambre la nuit, libérant les alevins de 2 mm (Debelius 1986). Nous n'avons connaissance d'aucun témoignage de réussite de l'élevage du frai mais cela semble possible avec du temps et de la patience.
Les Valenciennea, Amblygobius et Signigobius biocellatus peuvent aider l'aquariophile à maintenir un sol propre et sain mais nous devrons toujours remuer et siphonner le sable en cas de problème. Bien que ces poissons soient d'actifs tamiseurs, ils ne peuvent pas le faire avec un substrat trop gros comme de la dolomite ou du corail concassé. En fait, ils peuvent se blesser en essayant de traiter un substrat de trop grande taille ou trop grossier et des infections bactériennes peuvent s'en suivre. Le meilleur substrat à utiliser aura une granulométrie inférieure à 2 mm de diamètre comme le sable de corail ou des coraux finement broyés. Pour aider à la construction des terriers, comme nous l'avons dit plus haut, des graviers d'une taille plus conséquente devront être mélangés au sable fin pour fournir des "briques" aux poissons.
Tableau I
V. strigata : le corps est gris clair, la tête jaune avec un trait bleu derrière et sous l'œil.
Origine : de Afrique de l'Est aux Iles de la Société
Taille maximum 18 cm.
V. helsdingenii : le corps est blanc avec deux bandes orange allant de la tête à la queue et un ocelle noir sur la première nageoire dorsale.
Origine : de Afrique de l'Est à l'Ouest du Pacifique.
Taille maximum 16 cm.
V. longipinnis : le corps est blanc avec des stries horizontales constituées de pointillés orange-rouille et de points marron ainsi que d'une rangée de 5 taches en forme de fer à cheval aux bords bleutés et sur la partie basse du corps.
Origine : de l'Est de l'Océan Indien à l'ouest de l'Océan Pacifique.
Taille maximum 15 cm.
V. puellaris : le corps est crème ou gris clair avec des stries orange soulignées de bleu de la bouche à la queue et des taches orange sur la partie supérieure du corps.
Origine : De la Mer Rouge aux Iles Samoa et Marsall
Taille maximum 14 cm.
V. sexgutta : le corps est blanc avec des points bleus sur les joues et les branchies.
Origine : de Afrique de l'Est aux Iles Samoa et Marsall
Taille maximum 14 cm.
Photo, Bertrand LESAEC
V. wardi : le corps est alterné de bandes verticales blanches et marron, une ligne bleue souligne l'œil. Un ocelle noir sur la nageoire dorsale et la caudale.
Origine : de l'Indo Pacifique à l'ouest de l'Océan Pacifique
Taille maximum 11 cm.
Tableau II
Les poissons du genre Amblygobius sont appelés : Hover Gobies en anglais,
To Hover veut dire planer, faire du vol stationnaire. Ces poissons étant souvent observés en nage stationnaire au-dessus du sol.
Amblygobius hectori (Smith, 1956) > Hector's Hover goby
A. phalaena (Valenciennes, 1837) > Phalaena's Hover goby
A. rainfordi (Whitley, 1940) > Rainford's Hover goby
Signigobius biocellatus (Hoese and Allen 1977) > Signal goby, (Gobie à deux ocelles)
Les poissons du genre Valenciennea sont appelés : Sleeper goby en anglais et le nom de genre lui-même vient du premier découvreur de ces poissons l'ichtyologiste Valenciennes. En français on les nomment également gobies dormeurs.
Valenciennea strigata (Brousonet 1782) > Yellow-headed Sleeper goby
V. puellaris (Tomiyama, 1955) > Maiden or Diamond Sleeper goby
V. wardi (Playfair & Gunther, 1886) > Banded or Tiger Sleeper goby
V. sexguttata (Valenciennes, 1837) > Sixspot Sleeper goby
V. helsdingenii (Bleeker, 1858) > Two-stripe Sleeper goby
V. longipinnis (Lay & Bennett, 1839) > Long-finned Sleeper goby
Références :
Achterkamp, A. 1986. Bewust kiezen... een serie praktische
aquariumtips/4. Het Zee-Aquarium 36(5):92-93.
-------------- 1991. Bij de voorplaat... Amblygobius phalaena.
Het Zee-Aquarium 41(5):104-105.
Debelius, H. 1986. Fishes for the Invertebrate Aquarium. Reimar Hobbing GmbH, Essen.
Delbeek, J.C. 1989. The Mandarin Fish: Synchiropus splendidus
(Herre). Seascope Vol 6 (Fall):1,3.
Hiatt, R.W. and D.W. Stratsburg. 1960. Ecological relationships of
fish fauna on coral reefs of the Marshall Islands. Ecol. Monogr.,
30:65-127.
Hudson, R.C.L. 1977. Preliminary observations on the behaviour of the
gobiid fish, Signigobius biocellatus Hoese and Allen, with
particular reference to burrowing behaviour. Z. Tierpsychol., 43:214-
220.
Paulson, A.C. 1978. On the commensal habits of Ptereleotris,
Acanthurus, Zebrasoma with fossorial Valenciennea
and Amblygobius. Copeia, 1978:168-169.
Myers, R.F. 1989. Micronesian Reef Fishes. Coral Graphics, Guam.
St. John, J.,G.P. Jones, and P.F. Sale. 1989. Distribution and
abundance of soft-sediment meiofauna and a predatory goby in a coral
reef lagoon. Coral Reefs 8:51-57.
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Article publié le 26/11/2003 par Christian Seitz ; Cet article inédit est apparu dans l'édition d' Aquarium Fish Magazine de mai 1993 sous le titre "Les Gobies tamiseurs de substrat … gagnent à être connus !" , traduit de l'ariticle original "The Substrate Sifting Gobies: Fishes that Earn Their Keep" par J. Charles Delbeek and Scott W. Michael
(Traduction et adaptation de Christian Seitz, avec l'autorisation des auteurs).
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