Aiptasia, état de l'art ...
Date: 20 novembre 2003 à 14:01:36 CET
Sujet: Animaux


Maintenance
L'aiptasia est une petite anémone (jusqu'à 12 cm de haut, rapporte-on) dite "anémone de verre" de couleur brune transparente. Elle n'est pas spécifique d'une origine géographique particulière (vous pourrez être infesté avec des PV de n'importe quelle provenance ! ). Elle se reproduit facilement, par scissiparité ou par lacération (reproduction asexuée).




Comment faire reculer l'invasion d'aiptasia

I ) C'est quoi, l'aiptasia ?

Il existe plusieurs espèces d'aiptasia, que nous ne détaillerons pas ici. En effet, nous nous focaliserons sur les moyens de les éradiquer des bacs récifaux, et leurs faiblesses (que nous allons utiliser) sont communes à toutes les espèces.


aiptasia aiptasia aiptasia
Photos, Julien THEODULE


Elle se déplace facilement, et à la manière de Discosoma sp., son pied se lacère pendant qu'elle change de place. Elle laisse derrière elle toutes une série de fragments et cellules qui donneront autant d'individus. Ces facteurs combinés aboutissent souvent à une invasion, et les éradiquer devient alors un combat désespéré mais vital. L'invasion est rapide et implacable. Elles sont de plus très urticantes et peuvent brûler tout ce qu'elles touchent (anémone, coraux de toutes sortes et formes, etc ...)


aiptasia brulant un xenia aiptasia aiptasia
Photos, Julien THEODULE, Hervé ROUSSEAU

On rapporte également que ses tentacules urticantes peuvent irriter les poissons par contact, entraînant stress et ce qui s'en suit ... Si différentes solutions existent pour les éradiquer, aucune n'est parfaite ; Il faut d'ors et déjà noter que tous les procédés qui consistent à gratter, broyer ou fragmenter l'aiptasia seront des échecs à terme, puisque chaque morceau d'anémone donnera une nouvelle anémone.


II ) Elimination par méthodes manuelles :

A) L'injection seringue

Commençons par les méthodes manuelles d'élimination. L'idée de base est d'injecter au coeur de l'aiptasia une substance qui va la brûler, la consommer, provoquer un choc osmotique, etc ... bref provoquer la lyse de l'aiptasia. Pour cela, nous nous munirons d'une seringue hypodermique que vous trouverez chez votre pharmacien. La seringue remplie, il faut viser le pied de l'anémone, et traverser le membrane pour tenter de remplir la cavité interne avec le liquide. Lors de l'injection, l'anémone va se rétracter. Vous devriez néanmoins avoir le temps d'injecter.

1 ) L'eau bouillante

C'est le produit le moins difficile à trouver. On vise bien entendu ici le choc thermique. C'est une méthode avantageuse, puisque vous n'apportez pas de produit supplémentaire à votre aquarium. D'un autre cote, même si cette méthode est décrite comme efficace par certains, je n'ai pas réussi à constater de bons résultats.

2) L'eau salée

Certains rapportent des expériences à l'aide de l'eau salée. L'avantage indéniable est que c'est le produit le moins dangereux de tous ceux qui sont proposé ici. Injecter à l'aiptasia une eau de très forte densité permet un choc osmotique. Je suis néanmoins d'avis que par cette méthode, vous ne pouvez pas être sur d'atteindre toutes les cellule de l'aiptasia, et donc qu'une régénération (ainsi qu'une multiplication ?) risque d'être constatée.

3) L'HCl

Parmi les méthodes suivantes, on va injecter un acide ou une base forte, afin de détruire, liquéfier toutes les cellules de l'anémone. Parmi ces substances, on trouve l'acide chlorhydrique (HCl). Son achat peut s'effectuer pour une somme très raisonnable dans n'importe quel supermarché. Celui que j'utilise est à 33%, un classique.

acide injection
Photos, Julien THEODULE

Je l'utilise pur. Le piquage de l'aiptasia provoque son affaissement et sa délitation in situ. Si vous avez bien rempli la cavité interne de l'aiptasia, elle sera entièrement brûlée. Sinon, il arrive (comme à chaque fois !) que vous assistiez à sa régénération.

On insistera sur le fait que l'acide chlorhydrique est un produit dangereux, et que de plus cette méthode a l'inconvénient de faire baisser le pH du bac. En effet, je me suis surpris à mesurer un pH de 7.26 après avoir piqué une trentaine d'aiptasia dans un bac de 200 litres. On prendra donc soin de ne traiter que quelques aiptasia par jour, afin de donner le temps au pH et au KH d'absorber la charge acide... Préférez de toute façon un acide " pur ", le vinaigre par exemple n'étant pas assez concentré, et apporte un tas de composés aussi inconnus qu'indésirables dans l'aquarium.

4) L'hydroxyde de calcium

De la même manière que pour l'acide, on pourra tenter de détruire l'aiptasia par injection d'une base. L'injection de lait de chaux est un moyen pratique ; en effet, il vous suffit de récupérer votre fond de réacteur à calcium.

Certains utilisent du lait de chaux bouillant, afin d'augmenter encore l'efficacité. Un intérêt supplémentaire de cette méthode est que vous êtes (normalement ! ) à l'abri des chutes de pH ... :o)

Il est a noter que certains utilisent le lait de chaux en le déposant sur le disque oral et les tentacules afin que l'aiptasia l'ingère. Il n'y a donc pas injection mais le résultat escompté reste le même.

5) La soude

Concernant la soude, les proportions recommandées ont été gracieusement postée sur aquamer ici :

le résumé est le suivant :

on utilise de la soude pour deux raisons :
- nos bacs en général ont plus tendance à la baisse du pH qu'à la hausse et l'ajout d'un acide ne va pas dans le bon sens. En plus le vinaigre c'est un produit contenant plein de chose et de composition variable et indéfinie
-la soude concentrée en l'absence de courant fort forme autour de l'injection un nuage "gélatineux" qui stagne et facilite la destruction de l'aiptasia. Je prépare une solution avec environ 5 pastilles de soude pure (NaOH pur) dans 15 ml d'eau (une éprouvette à réaction TETRA) et j'injecte parfois jusqu'à 3 fois cette quantité (45 ml) dans un bac de 65 l (le seul ou j'ai eu des aiptasia ces dernières années) à raison d'une seringue de quelque ml par aiptasia piquée dans le "coeur". Pour éviter la dispersion de la soude sur les coraux voisins il faut couper le brassage et la soude reste en "nuage" pour ne se diluer que lentement.

Vous trouverez pour information le sachet de 250 g de soude en pastille auprès de votre pharmacien pour environ 10 euros (parfois sur commande)... ces pastilles portent aussi le nom de " soude caustique ".

Conclusion des piqûres :

Ces méthodes utilisent des produits corrosifs, pouvant affecter les paramètres du bac. En plus, vous n'atteindrez pas les aiptasia cachées dans les trous ou inaccessibles à cause du décor !


B ) Le produit chimique

Dans la suite des méthodes peu naturelles mais sans piqûre, on trouve le produit " Salifert Aiptasia Exit ", que je n'ai pas encore testé. Il s'agit d'une substance verdâtre que l'on dépose à l'aide d'une seringue dans la bouche de l'aiptasia et un peu sur elle. Le but est qu'elle en ingurgite afin qu'elle s'intoxique : Elle meurt en 24 heures. Ce produit ne présente normalement aucun danger pour les autres habitants du bac.

C ) Le planté de bâton

L'aquarium récifal volume 1 (Sprung et Deelbeck) propose également le plantage de bâton ( :o) ) de cuivre dans la bouche de l'aiptasia. Ceci peut être efficace, mais dangereux pour la population générale de l'aquarium récifal qui, on le sait, n'aime pas vraiment le cuivre ...

D ) L'enfermement

Une autre méthode consiste à enfermer l'aiptasia sous une pâte d'hydroxyde de calcium. Il va de soi que ce n'est pas toujours possible due à la position de l'aiptasia. On obtient néanmoins quelques succès d'estime.

E ) L'aspiration

L'idéal serait d'imaginer un appareil qui décrocherait et aspirerait l'aiptasia de son support, tel l'appareil d'aspiration du dentiste. Si quelqu'un a une idée, qu'il m'écrive ! :o) ( idée prise ici suite a la lecture http://petsforum.com/fishnchips/2002/fnc0102.html )

F ) le support de substitution

Une méthode élégante a été proposée sur aquamer que nous appellerons la " méthode de la coquille de moule trouée. " On recouvre l'aiptasia d'une coquille trouée. Attirée par la lumière, l'aiptasia grimpe, et on retire alors la coquille : extraction du problème. Malheureusement, il apparaît qu'en montant, l'aiptasia lacère son pied, donc peut redonner une (voire des) aiptasia dès que l'éclairage du rocher d'origine reprend...

A éviter :

D'une manière générale, on évitera donc toute lacération, grattage, broyage de l'aiptasia. Toute cellule dispersée donnera autant d'aiptasia.

aiptasia
Photo, Julien THEODULE

On fera également attention aux éventuels nuages toxiques qui pourraient résulter des injections des différents produits cités ci-dessus, en particulier de la chaux. On recommande donc d'arrêter les pompes, et si un corail était touché, un léger battement de la main pour disperser le nuage.

On évitera de même de piquer à l'acide chlorhydrique un grand nombre d'aiptasia en même temps, et on préférera les piquer par groupe de 10, par exemple, à plusieurs heures ou jours d'intervalles, ceci afin de ne pas provoquer un changement rapide du pH.

On peut également trouver la recommandation de faire bouillir la pierre. On voit tout de suite l'impossibilité de cette méthode si on a un décor conséquent, et de plus, on stérilise la pierre, ce qui est exactement l'inverse de ce qu'on cherche à faire en achetant des pierres vivantes (on peut ajouter qu'en plus, après toutes ces aberrations, la place sur la pierre est libre pour le développement d'algues, etc ...).


IV ) Les armes naturelles :

A ) Remarques

Dans les remarques générales, il apparaît que le manque d'iode est fatal aux aiptasia, mais il fait souffrir les coraux et anémones avant elles. Il semble acquis que la prolifération d'aiptasia est synonyme d'eau fortement chargée en nutriment. Une première piste pourrait être de contrôler ces nutriments.

B ) Concurrence

L'idée est ici d'occuper le terrain avant les aiptasia. Certains Erythropodium caribbaeorum sont tout à fait capables de coloniser la roche et les trous affectionnés par aiptasia. Néanmoins, elles sont urticantes, et c'est donc remplacer un mal par un autre.


C ) Prédateurs

Ici, on n'a plus de problème d'accessibilité. Ces méthodes ont évidemment le mérite de ne pas déstabiliser votre bac, et sont plus " naturelles et écologiques " que la piqûre à l'acide ou la barre de cuivre ...

1 ) Poisson

L'introduction d'un poisson papillon, par exemple Chelmon rostratus, est une piste souvent préconisée dans la lutte contre l'aiptasia, dont il se nourrit.


Chelmon Rostratus
Photo, Hervé ROUSSEAU
(pour tout savoir sur ce poisson, consulter sa fiche !)

Comme tous les poissons conseillés pour leur faculté à pouvoir manger tel ou tel occupant de l'aquarium, il s'agit avant tout d'un histoire d'individu. Certains verront donc leur Chelmon dévorer les aiptasias, d'autres s'apercevront qu'il refuse d'y toucher ... Parmi les critiques qu'on peut relever concernant ce poisson, on notera qu'il ne s'attaque donc pas toujours aux aiptasias. Par contre, il pourra trouver à son goût vos vers tubicoles, Parazoantus et polypes d'Acropora. De même l'acclimatation peut poser des problèmes, Chelmon étant un poisson timide et fragile. Sa cohabitation avec un flavescens est parfois difficile. Enfin, une fois les aiptasias terminées, il faudra penser à sa reconversion nutritionnelle, car il n'est pas évident qu'il accepte les différents types de nourriture que vous pourriez lui proposer. Les succès se font souvent à l'aide de surgelés, lyophilisés, moules, ...

2 ) Crevette

La crevette mangeuse d'aiptasia par excellence est Lysmata wurdemanni.


Lysmata wurdemanni Lysmata wurdemanni
Photo, Julien THEODULE
(pour tout savoir sur cette crevette, consultez sa fiche ! )

Ces crevettes se nourrissent en effet d'aiptasia, en plongeant leurs pinces au coeur de celles-ci, et en arrachant les " boyaux ", spectacle fort impressionnant. Les Lysmata wurdemanni s'attaquent surtout aux petites aiptasias. Il faudra donc prendre soin de dégommer les grosses, ou bien les déchiqueter pour faciliter le travail de la crevette, qui semble impuissante face aux grands spécimens, qu'elle ne fait que " taquiner " et- se recroqueviller.... On ne note aucun problème de cohabitation entre Lysmata wurdemanni et Lysmata amboisensis ....

La tendance de Lysmata wurdemanni à déchiqueter l'aiptasia permet de lui assurer un garde-manger par la repousse d'autres spécimens. On sera donc attentif à la disparition de ces crevettes, qui pourra alors être précurseur d'une nouvelle explosion d'aiptasia. il faudra alors (idéalement) remettre de nouveaux spécimens de ces crevettes dans le bac, ou juguler l'invasion le plus tôt possible.

Inconvénient : on a parfois du mal a trouver à la vente Lysmata wurdemanni. Elles sont de plus très peu visibles, et surtout de sortie la nuit. On la confond parfois avec des Rhynchocinetes sp. qui peuvent être corallivores.

3 ) Limace

Une espèce de nudibranche, Berghia verrucicornis, se nourrit exclusivement d'aiptasias.

Berghia verrucicornis Elle n'est pas facile a trouver, et est présente principalement sur le marché US bien que peu exportée, mais relativement facile à reproduire. Elle se présente sous la forme d'une limace verte avec des taches noires. Le problème est évidement dans son alimentation, qui fait que si il n'y a plus d'aiptasia, elle dépérira pour ensuite mourir. La solution consisterait à entretenir une petite source d'aiptasias (dans le refuge par exemple...) mais c'est entretenir un cercle vicieux. On peut aussi envisager de la laisser brouter les aiptasia dans son bac, pour ensuite la donner à un autre aquariophile ; mais on n'achète pas en général un animal pour savoir qu'on ne pourra pas le garder. Une solution serait à construire avec et par les détaillants, en ELEVANT cette limace. Ils pourraient alors la louer aux demandeurs (quel récifaliste n'a jamais eu d'aiptasia ? ?) à la semaine par exemple. En cas de mort, le détaillant fait payer le prix de l'animal. Il entretient pour cela une culture d'aiptasia.

La vision d'Eric Borneman sur cette limace

Pour information, un carton de ce nudibranche ramène le prix de la bête à 13 euros et 55 euros de frais de port.


V ) Adresse Internet et référence :

l'Aquarium Récifal de Sprung et Deeelbeck vol 1
FAQ sur les aiptasia, sur www.aquarium.net
Résumé des 3 moyens de contrôle : Lysmata wurdemanni, poisson papillon et bon développement sur Berghia verrucicornis (acclimatation et stockage), sur reefs.org
Description technique et physionomique de l'aiptasia. Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur son anatomie sans jamais oser le demander, sur www.science.lander.edu.
www.breeders-registry.gen.ca.us et www.seaslugforum.net, ou Berghia est une mangeuse d'aiptasia
Quelques pistes pour les vaincre, un certains nombres d'expériences relatées, sur www.science.lander.edu.
Différence entre vente Lysmata wurdemanni et Rhynchocinetes sp. sur reefs.org
La vision d'Eric Borneman sur reefs.org
Mail de Marc Langouet donnant les proportions pour utiliser la préparation à base de soude, sur aquamer
Une idée façon " dentiste " ! :o) sur petsforum.com




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Article publié le 26/11/2003 par Julien Théodule ; Article publié initialement sur le site de l'ARA le 10/04/2002





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