Carnet de voyage, vol. 2, mars 2004
Date: 13 mars 2004 à 10:45:00 CET Sujet: Animaux
Juste avant Noël puis en février, j'ai passé quelques jours à Jakarta où j'ai visité une grande partie des exportateurs de coraux et de poissons. J'ai été surpris de constater que la demande en coraux teintés est de plus en plus importante car de nombreux exportateurs en proposent. Il y a quelques années c’était assez rare d’en trouver, malheureusement ce n’est plus le cas. Même si la destination finale de ces animaux est principalement l’Asie, l’Europe et les États-Unis sont aussi demandeurs. J’ai remarqué que les gens qui demandaient ces coraux le faisaient surtout par méconnaissance et qu'ils généraient une demande en coraux de plus en plus colorés. C’est pourquoi j’ai décidé de lever le voile sur ces pratiques et d'informer notre communauté. C’est par l’information que l’on peut arrêter ce genre de pratiques.
Les coraux teintés :
Cette techniques est apparue dans les années 1990. Les premières victimes furent les anémones Heteractis crispaqui étaient colorées en jaune. Ensuite cette technique s’est vite étendue à d’autres espèces d’anémone comme Stichodactyla gigantea. C’est vers 1999 que les premiers coraux durs et coraux mous ont été colorés artificiellement avec des espèces comme Cynarina lacrymalis, Trachyphyllia geoffroyii, Turbinaria peltata…
Cet hiver j’ai remarqué une forte tendance pour les Klyxum sp., et autre Sinularia sp. rosefushia. Ceux-là on le seul mérite de sauter aux yeux et de faire vraiment bonbon chimique.
Sinularia sp. aussi roses que des fraises tagada !
Photo, Vincent CHALIAS (www.amblard.fr)
Les couleurs les plus couramment utilisées sont le jaune, le rose et le bleu, mais des nouvelles colorations sont sûrement en cours d’essai.
A l'origine il y a souvent des animaux marrons qui, restés trop longtemps dans la pénombre, ont perdu une partie de leurs zooxanthelles. Ces animaux n’ont pas une grande valeur commerciale, et c’est pourquoi certains collecteurs ou exportateurs essayent de les «recycler». Si la demande est forte, ils peuvent même mettre les animaux pendant plusieurs jours dans l’obscurité totale pour leur faire perdre leurs zooxanthelles.
La technique est assez simple, les colorants utilisés sont des colorants alimentaires, couramment utilisés dans la pâtisserie. Il suffit de rentrer dans une pâtisserie indonésienne pour trouver les gateaux français assez ternes. Pas au niveau gustatif, mais au niveau visuel ! Du rouge, du vert, du bleu… Un gâteau bleu me coupe l’appétit mais cela ne les dérange pas du tout et même cela semble le leur ouvrir !
Il suffit donc de de placer un corail resté préalablement quelques temps dans l’obscurité dans une bassine d’eau de mer aérée avec une bonne dose de colorant alimentaire. Il faut laisser mijoter quelques heures, et vous obtenez une Turbinaria peltata jaune vif ! Le corail ensuite relargue beaucoup, c’est pourquoi il vaut mieux avoir beaucoup d’eau de mer à disposition pour les changement d’eau. Quelquefois il faut répéter l’opération plusieurs fois pour obtenir une coloration plus intense et plus durable.
Turbinaria peltata jaune-poussin !
Photo, Vincent CHALIAS (www.amblard.fr)
Il ne fait aucun doute que ces animaux sont soumis à un stress énorme et que même sans l’épreuve de la coloration leurs chances de survies sont assez réduites. Les spécimens survivants à l’expédition, aux séjours chez les différents intermédiaires, et qui arrivent chez un aquariophile soigneux finissent par perdre leur couleur entre 1 et 6 mois après l’acquisition, selon la qualité de la coloration.
Et je conclurais par le slogan favori des association de protection des animaux : lorsque la demande s’arrête, la destruction de l’environnement peut aussi s’arrêter. Et je pense que seul l’information peut arrêter ce genre de pratiques. En espérant que la prochaine fois que vous verrez ces animaux chez votre détaillant vous ferez passer le message, et que dans l’avenir il n’en commandera plus.
A bientôt
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Article publié le 02/03/2004 par Vincent Chalias (www.amblard.fr)
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