Conception d’une cuve dédiée aux pompes de brassage
Date: 02 avril 2004 à 11:00:00 CEST
Sujet: Pratique


brassage
Dès les premières lectures «récifales», il apparaît clairement que le brassage de l’eau est une des pierres angulaires de la bonne santé d’un bac. Et, après avoir «visité» de nombreux bacs, cela se voit… Pompes disgracieuses, immergées ou non, plus ou moins bien fixées gâchent le spectacle. Après de nombreuses années consacrées aux aquariums d’eau douce où le problème ne se pose pas ou presque, il me fallait trouver une solution esthétique pour le placement de ces pompes.



Cuve de brassage (CB)

L’idée de séparer un bac en deux parties dont l’une serait consacrée au brassage, n’est pas originale. Dans son article «Construire un aquarium idéal », F. Poiraud-Lambert cite cette idée comme une option de luxe utilisée dans certains aquariums AquaMedic : une telle cuve est prévue, fixée à l’arrière du bac. Le rôle de cette cuve est ici double : dissimuler les pompes de brassage, mais aussi aspirer les sédiments au fond de la cuve principale (CP) pour les rendre aisément exportables. Ceci implique une CB profonde pour pouvoir garantir l’aspiration des sédiments. Le verre utilisé pour cette cuve doit donc pouvoir aussi supporter la pression de l’eau.

Une autre technique plus simple et moins coûteuse est possible : il s’agit de séparer la CP à l’aide d’une vitre en laissant un ou deux centimètres entre cette vitre et le fond du bac. La pression étant identique de part et d’autre de la vitre de séparation, son épaisseur peut être moindre. Les sédiments seront là aussi aspirés vers l’arrière. Cet espace destiné à la sédimentation sera accessible aux animaux, les pompes de brassage devront donc être munies de crépines. Il est bien sûr possible de bloquer cet accès en utilisant, par exemple, un grillage plastique ou de grosses crépines fixées sur l’admission de l’eau dans la CB. Dans les deux cas, cela pose un problème d’entretien : l’accès à ces «grilles » se fait par l’arrière du bac et elles sont placées en profondeur …


Petite histoire

Le bac destiné aux coraux était déjà chez moi. Il s’agissait d’un bac dédié aux petits M’bunas du lac Malawi : pas question de modifier le meuble (90 cm de haut) et son support un peu alambiqué de tubes métalliques, les dimensions de ce bac : 1.245 m de façade, 75 cm de largeur et 65 cm de hauteur. Ceci était insuffisant pour, dessous, y loger confortablement tout le matériel prévu (bouteille de 10 kg de CO2 (1.2 m), réacteur à calcaire, réacteur à calcium, petits équipements encombrants (tests, additifs, densimètre, pinces, raclette,…)) et, bien sûr aussi, la cuve technique. Après négociation familiale, le bac sera éloigné du mur et l’espace occupé fera 1.05 mètre de large au lieu de 75 cm. Tout devient alors possible : la cuve technique sera perpendiculaire à la façade du bac, 1.05 m par 55 cm libérant un espace de rangement important sur l’autre moitié du meuble et permettant, à l’arrière, l’installation de ma cuve de brassage. Pourtant, pas question de faire une CB de 65 cm de hauteur suspendue au-delà de ce que mes 75 cm de support pouvait offrir. De plus, le bac étant placé en angle, il fallait prévoir un accès simple pour le nettoyage. La CB sera donc suspendue, mais beaucoup moins haute pour diminuer poids et pression : tant pis pour les sédiments, mais plus de problème pour dissimuler la haute bouteille de CO2. Et puis diable, tant qu’à cacher, je ferai un décor en mousse polyuréthane comme dans mes bacs d’eau douce.


Conception du brassage

Dans la configuration initiale qui a conditionné la forme de la CB, j’utilisais 3 paires de pompes (1200 l/h) pour le brassage de surface ainsi qu’une pompe de 1800 l/h pour un brassage de fond. Toutes fonctionnaient simultanément. Le rejet de chaque pompe de surface était orienté vers la vitre de façade. Il s’est avéré que ceci était inefficace malgré un brassage global de 8000 l/h pour une cuve de 600 l : trop de sédiments s’accumulaient sur les pierres vivantes et, plus grave selon moi, la croissance des coraux, même si elle était importante, n’était pas naturelle comme le montre la photo du Seriatopora hystrix ci-dessous.


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Photo, Bertrand le Saëc

Aujourd’hui, seules 2 pompes de 2800 l/h fonctionnent alternativement. Leur rejet, partant des coins de la CB, est orienté vers les 2/3 de la vitre de façade. Ceci permet d’avoir, vu de dessus, un mouvement de rotation de l’eau qui s’inverse quatre fois par jour. Plus précisément, le cycle de 12 h de fonctionnement des deux pompes est le suivant :


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Elles sont pilotées par deux prises dont la programmation est indépendante, mais asservie à une même horloge, ce qui garantit la synchronisation des cycles. La période du cycle de 6 h, sensé simuler l’inversion du courant des marées, se termine par une zone d’étale de 30 mn et comporte un pic «d’activité» d’une demi-heure où les deux pompes fonctionnent ensembles.

L’utilisation de la pompe brassage de fond n’a pas changé son débit toutefois est maintenant de 2800 l/h. Son flux est réparti sur toute la longueur de la cuve à l’aide d’un tube de PVC en boucle, percé tous les 5 cm de trous de 5 mm de diamètre. C’est le fait que le tube soit fermé en boucle qui permet d’avoir une pression d’éjection identique pour tous les trous malgré leurs diamètres identiques.


Conception de la cuve :

Plusieurs contraintes ont guidé la conception initiale : la vitre arrière de la cuve principale devait recevoir une descente d’eau inclinée vers la cuve technique ainsi que deux rejets pour les pompes de remontée. D’autre part, il ne fallait pas que cette cuve soit trop longue pour un accès facile. La longueur est donc limitée à 80 cm. La hauteur choisie est donc de 25 cm augmentée de 5 pour le cas où une pompe se décrocherait… Trois équerres triangulaires de 25 par 25 cm en verre soutiennent la CB. Vu la hauteur d’eau dans celle-ci, 5 mm d’épaisseur de verre aurait été largement suffisant, pourtant pour des raisons de solidité, j’ai opté pour du 8 mm. Pour la largeur, 25 cm ont été nécessaires pour le placement de la pompe de brassage de fond et des 6 pompes de brassage de surface de la configuration initiale. Aujourd’hui, cette largeur est généreuse; elle aurait pu être diminuée de 5 cm, mais guère plus. Une dernière précision, le volume d’eau contenu dans la cuve, pompes en fonctionnement, est de 40 l. Le schéma ci-dessous montre le positionnement de la CB sur la CP.


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Les pompes devant communiquer avec la cuve principale, la vitre arrière est percée de plusieurs trous, mais ce perçage était, de toute manière incontournable pour la descente d’eau. La cuve « Malawi » a donc été démontée…


brassage Deux trous de 16 mm pour les pompes de remontée et un de 55 mm pour la descente d’eau vers la cuve technique ont été faits. Deux ouvertures de 45 mm de diamètre assurent l’admission d’eau dans la CB. Elles sont équipées de tuyaux en PVC coudés de même diamètre qui plongent au fond de la CP. L’extrémité inférieure de ces tubes est grillagée. Ceci permet une aspiration en fond de l’eau rejetée en surface : une bonne chose pour le mouvement de l’eau dans le bac. Cette aspiration a eu une conséquence non prévue, la CB est aussi devenue une cuve de sédimentation particulièrement commode à nettoyer. Si j’avais su, les admissions auraient été placées à 5 cm du fond de la CB pour favoriser encore cette sédimentation. Pour la pome de brassage de fond aucun perçage n’a été fait dans la vitre pour faciliter l’entretien de la tuyauterie. Le schéma de perçage ci-dessous n’est pas exactement celui suivi dans le bac : les 6 trous des petites pompes disparues ont été remplacés par les 2 qui auraient dû être là pour les deux nouvelles grosses pompes. Malgré tout, 2 de ces 6 trous sont actuellement utilisés pour le rejet des pompes. Si c’était à refaire, ces éjections auraient un diamètre de 20 mm, au moins, protégées par grillage pour avoir une éjection bien large !!!


Le décor polyuréthane

Cette technique pour habiller les vitres est depuis plus d’une dizaine d’années bien maîtrisée en eau douce. Le principe est simple : on utilise un mélange de deux composants que l’on fait polymériser directement sur une vitre préalablement enduite, grossièrement mais uniformément, de colle silicone. On n’utilise pas de mousse en bombe pour laquelle la polymérisation a déjà eu lieu. L’accrochage sur la vitre est imbattable. Ensuite, en eau douce, trois couches de résine époxy garantissent que le décor ne sera pas attaqué par les animaux, l’étanchéité est garantie par un boudin épais de colle que l’on a soin de disposer sur le pourtour prévu de la mousse polyuréthane. La réelle difficulté est de faire un décor peu épais, mais naturel. Ceci se fait au cutter, couteau et ciseau à bois… En eau de mer, la méfiance quant à l’innocuité du polyuréthane doit primer: une fois la sculpture achevée, le décor a été enduit de deux couches « grasses » de résine suivies de trois autres imprégnées densément d’un sable très fin. Il a été facile de réaliser des trous propres dans la mousse pour les passages d’eau (avant résinage). Dans cette mousse, le tube rigide de rejet de la pompe de brassage de fond est dissimulé. Une dernière chose, il n’y a pas de mousse polyuréthane sur le bas de la vitre arrière; cela permet de voir ce qui se passe sous le décor de pierres vivantes en glissant la tête sous la CB.


Avantages de la cuve de brassage et du décor polyuréthane

1) Dissimulation complète des pompes derrière le décor polyuréthane ainsi que du siphon du réacteur à calcaire
2) Pas de crépines sur les pompes, amélioration du débit et de la maintenance
3) De manière imprévue, la cuve est une zone de sédimentation importante, et ce, malgré le mouvement d’eau dans cette cuve : 100 à 200 fois son volume par heure !!! Cette sédimentation peut être favorisée par la présence de débris de coraux ou de pierres vivantes. Sédiments très facilement accessibles
4) La mousse polyuréthane est particulièrement favorable au développement des algues calcaires
5) Fixation de boutures sur le décor polyuréthane : gain de surface pour fixer les coraux
6) La hauteur de placement de la cuve permet de dissimuler dessous une grande bouteille de CO2


Inconvénients de la cuve de brassage et du décor polyuréthane

1) Un manque évident de souplesse pour le positionnement des pompes de brassage
2) Une perte de place toute aussi évidente
3) Un peu plus de bruit (sourd): les vibrations des pompes sont moins amorties dans une petite cuve
4) La mousse polyuréthane résine interdit la présence d’oursins qui semblent adorer brouter la résine époxy
5) Des aiptasias sont présentes dans la cuve de brassage : pas de prédation possible
6) Il faut couper le brassage pour l’alimentation des animaux, sinon une partie importante de la nourriture s’y retrouve piégée
7) Les pompes n’étant pas munies de crépines dans la CB, le grillage des admissions étant d'une maille de 0,5 cm, les trop petits poissons sont en danger, par exemple Gobiosoma evelynae.


Quelques photos :

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Photos, Bertrand le Saëc



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Article publié le 05/03/2004 par Bertrand le Saëc





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